Décès de l’organisateur Jean-Paul Touzé
Jean-Paul Touzé est décédé samedi 26 octobre au centre hospitalier de Belfort au cours d’une opération chirurgicale. Il avait 63 ans. Une occlusion intestinale serait à l’origine de la mort du « Monsieur Echecs » de Belfort depuis 1973. L’Est Républicain a annoncé sur son site la triste nouvelle dimanche vers 11h avec un court témoignage de sa fille Stéphanie.
Ses obsèques ont eu lieu jeudi 31/10 à 10 h 30, en l’église Saint Joseph de Belfort (7 rue Voltaire).
Sur le territoire français, Jean-Paul était la plupart du temps l’agent puis était devenu l’ami de Karpov, actuellement en démonstration dans un tournoi de parties rapides, le Trophée Karpov. (“tu te rends compte, j’ai fait des centaines de blitz avec lui, je n’en ai jamais gagné une”).
Il avait multiplié les tournois de haut niveau, un championnat du monde des moins de 17 ans dès 1979, une Coupe du monde en 1988 (photo ci-dessous) avec Karpov et Kasparov et où il avait fait venir les champions du monde Smyslov et Botvinnik, des tournois fermés, une finale du top 16, un championnat du monde de problèmes, un match homme-ordinateur sur Minitel, une co-organisation avec l’open de l’Étang Salé à la Réunion sans son rôle, un temps, de secrétaire générale de la FFE et d’arbitre international.
On ne compte plus le nombre de joueurs professionnels passés par Belfort Échecs à une époque où son équipe cherchait un titre national. Bien sûr, Andrei Sokolov fut la première pierre d’un long édifice. Une année, même Karpov avait joué ! Pendant des années aussi, Richard Goldenberg a été aux manettes de l’enseignement sur le territoire de Belfort avant que les deux hommes ne se séparent.
Que ce soit avec sa ligue, les journalistes, les réunions fédérales officielles, la FFE – il a plusieurs fois tenté en vain d’en être le président – , Jean-Paul était un fort en gueule.
Sa dernière sortie avait consisté à demander d’être suspendu de la liste FIDE car il n’acceptait pas ses méthodes non démocratiques pas plus que la mollesse du combat de la FFE en ce sens.
Il ne se laissait pas faire jusqu’à la procédure. Ainsi, Air France lui avait demandé de payer en 1998 un supplément car, avec ses 170 kg, Jean-Paul occupait deux sièges dans un vol pour la Chine. Il avait refusé d’obtempérer. Par la suite, il avait mouché dans un débat télévisé le patron de la compagnie Jean-Cyril Spinetta.
Mais Jean-Paul avait un cœur gros comme ça et un amour des échecs que l’on retrouve rarement et sur une aussi longue période en France. Il faisait. Il bâtissait, alors les râleurs… C’était aussi un homme fidèle en amitié, notamment avec l’ancien maire de Belfort et ex-ministre Jean-Pierre Chevènement (son ‘Che’ comme il le nomme sur sa page Facebook) qui l’a toujours soutenu pour le développement des échecs dans ce territoire enclavé qui était, à force, devenu un rendez-vous international des années 1980-1990.
Chaque fois qu’il pouvait pousser un jeune qui montait dans l’un de ses tournois, Jean-Paul était au rendez-vous. Étienne Bacrot à Saint-Martin, Ponomariov au 3e Masters Comtois et tant d’autres.
Une grande figure des échecs français part trop tôt aujourd’hui. Comme il l’écrit sur sa page Facebook sur une légende d’une photo réglant une turbine : «
»Echecs64 présente ses condoléances à sa femme, sa fille, son gendre et leurs enfants à qui il était fier d’avoir appris à jouer. En repassant le film depuis Belfort 1983 où je fis sa connaissance au championnat de France (Jean-Marc Degraeve jouait l’open et avait 12 ans) à aujourd’hui, il n’y a pratiquement pas une seule année où Jean-Paul est resté inactif au niveau national comme international.
- Hommage sur le site de la FFE
- Informations et liens sur le compte twitter de L’Est Républicain
- Reportage de France 3
- Le Lion Touzé sur ses terres… et la tarte aux myrtilles.
- Des témoignages sur un forum “Les clubs gardent la parole”
- Toutes les informations publiées sur JPT sur ce blog
- Voir aussi la vidéo d’un blitz entre Jean-Paul et son ami Jean-Claude Moingt (août 2010) reconstituée sur ce blog.
La cérémonie à l’église Saint Joseph, cliquer ligne suivante.
La cérémonie
Plus de deux cent personnes étaient présentes à la cérémonie d’adieu en l’église Saint Joseph de Belfort ce 31 octobre 2013. Sa fille Stéphanie a fait un discours émouvant, positif en présence de son mari, de leurs trois enfants ainsi que de sa mère.
Des représentants du club ont pris la parole pour parler du vide qu’allait représenter son absence et ont raconté quelques anecdotes sur celui qui a remué ciel et terre pour faire exister Belfort sur la carte mondiale des 64 cases. Un texte très ingénieux à la mémoire de JPT a été lu par une mère, son jeune fils la lançant à partir des les initiales du prénom et du nom du défunt.
De nombreux officiels de la ville ou de la région dont Christian Proust (sauf Jean-Pierre Chevènement) étaient là, très attristés.
Un court message de condoléances a été lu par le président de la ligue de Franche-Comté Olivier Minaud lequel était intervenu sous les caméras de France 3 sur le parvis avant la cérémonie. Puis a été lu un court message de la ligue de Corse signé Léo Battesti. S’en est suivi un long message de l’ex-président de la FFE Jean-Claude Moingt, résumant le parcours et parfois les combats pittoresques de Jean-Paul. Tous deux étaient absents.
Présent à la cérémonie, le représentant des clubs français, le président fédéral Diego Salazar n’est pas intervenu. Du côté des officiels, l’arbitre Georges Bellet, accompagné du salarié fédéral présent dans toutes les manifestations jeunes Erick Mouret avaient fait le déplacement.
Côté joueurs, outre de nombreux Belfortains très bouleversés et notamment parmi les plus jeunes, la femme d’Andrei Sokolov représentait son champion de mari et Richard Goldengberg était également présent. Après la cérémonie, un pot d’adieu au club a réuni beaucoup de joueurs. Les jeunes se sont mis à l’ouvrage. Les pièces ont repris vie. Au club de Belfort, la vie continue plus que jamais.
J’adresse à Stéphanie mes sinceres condoléances, elle me reconnaitra, meme si la distance a fait qu’on ne se voit plus, je pensais souvent à toi en voyant régulierement ton papa sur son lieu de travail voisin du mien.
bises et courage à toi.
Cette fois il ne pourra pas faire appel..
Toute ma solidarité à son entourage, des souvenirs de bons moments avec un personnage qui a su rester disponible, souvent plus près d’un échiquier ou d’un jeu de tarot que des petits fours.
Ici Michel Polacco, France info, en direct de chez St Pierre : notre envoyé spécial nous apprend qu’un nouvel arrivant aurait réclamé avec beaucoup d’insistance un objet que personne ici ne connaissait et qu’il a appelé « une pendule » tout en répétant inlassablement « Où est Jean-Claude, où est Jean-Claude, où est Jean-Claude ? » Nous vous informerons dès que nous aurons plus de détails sur cette bien curieuse affaire.
Ici Michel Polacco, France info, nous reprenons l’antenne pour les tout derniers développements de cette affaire, toujours en direct de chez St Pierre.
On aurait aperçu deux silhouettes tapant très fort et à tour de rôle sur une étrange petite machine entre deux déplacements manuels de morceaux de bois aux formes bizarres et de couleurs différentes sur un espèce de tapis constellé de taches noires et blanches. Quelqu’un aurait cru reconnaître un dénommé Jean-Claude Louba, Louba quelque chose (je ne le connais pas et n’ai pas bien entendu son nom) arrivé, lui, depuis longtemps. Nous ne manquerons pas, chers auditeurs, de vous tenir informés de la suite des évènements, si quelque chose d’important venait à se produire.
Hergé
PS. Si Michel Polacco qui est le nom, comme tu le sais, d’un vrai journaliste et qui rend donc la parodie plus crédible, te pose problème remplacer par celui inventé de Jean-Louis Damias,
Il est des personnes qui ont tant fait pour leur discipline qu’il semble que leur nom soit indéfectiblement lié à celle-ci, qui ont tant œuvré dans leur domaine, qu’on finit par les croire immortelles.
Et c’est seulement quand on s’aperçoit que ce n’était qu’une amère illusion que l’on mesure tout le chemin qu’elles ont fait parcourir à leur art, à leur science ou à leur sport, que l’on découvre toute l’étendue de leur œuvre, toute la liste impressionnante de leurs réalisations.
Ainsi, en était-t-il de Jean-Paul Touzé.
Il avait certes ses admirateurs et ses détracteurs tout aussi inconditionnels mais tout le monde s’accordait à reconnaître qu’il était le contraire de l’eau tiède. Et il en était fier. A juste titre. Car la passion des échecs ne cessait de bouillonner en lui.
Qu’il me soit permis d’emprunter ici les inoubliables mots de Didier Barbelivien
(à propos de Nicolas Sarkozy dans le journal LE MONDE du 03.05.2012 )
« Chacun sait bien ici-bas que celui qui entreprend quelque chose a contre lui tous ceux qui voulaient faire la même chose, tous ceux qui voulaient faire le contraire plus tous ceux qui ne font jamais rien. »
Comme cette phrase aurait plu à Jean-Paul Touzé ! Et surtout, comme elle explique bien son inégalable aptitude à se fabriquer de « bons amis pour la vie ».
L’échec ne lui fit jamais peur tant que la cause lui parut juste, le combat, noble. Parmi ses qualités, il avait bien sûr aussi celle de se faire des ennemis mortels mais c’était le prix à payer pour son inépuisable énergie qu’il mettait toujours au service de sa passion pour le jeu d’échecs.
Certes, il se trompa plus d’une fois en croyant que, quand on n’était pas avec lui, c’était que l’on était contre lui. Certes, la nuance n’était pas son amie naturelle, mais il avançait toujours et surtout, faisait toujours avancer sa discipline. Toujours avec de nouvelles idées et de nouveaux projets. Et sans lui, les échecs belfortains, mais aussi les échecs français, ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui.
La (fausse) sagesse populaire dit que « personne n’est irremplaçable ». Mais c’est faux, complétement faux. La preuve ? Cette même (fausse) sagesse populaire dit aussi de certaines personnes que « si elles n’existaient pas, il faudrait les inventer ».
Jean-Paul Touzé était de ces personnes. De ces personnes dont on ne réalise tout ce qu’elles faisaient, tout ce qu’elles ont accompli que quand on n’en finit pas de mesurer le vide laissé par leur absence. Que quand on commence à croire que c’est vrai, qu’elles sont vraiment parties. Parties « Pour de vrai » comme disent les enfants. Et de façon scandaleuse parce que pour toujours.
Caissa est triste. Certes, demain le soleil se lèvera de nouveau sur la France échiquéenne, comme si de rien n’était mais le soleil belfortain ne brillera plus tout à fait de la même façon sur « le stade échiquéen Anatoli Karpov ».
Hergé
“sa dernière demande : être radié des listes FIDE”
Accordé.
bonjour, merci à vous pour cet hommage . ces 3 petits fils (Killian, Elliot et Rémy) ont été piqué par le virus des échecs grâce à la lumière qui brillait dans ses yeux lorsqu’il était devant un jeu d’échecs. il commençait déjà à initier le petit dernier. je passerai l’information du lieu et date de ses obsèques dès qu’il me seront communiqués. merci à vous tous