Les échecs, combien de divisions?
« Des subventions, d’accord. Mais combien avez-vous d’enfants dans votre club? » Eh oui! Un enfant a en général 2 parents donc 2 électeurs potentiels. Cette question pragmatique d’un élu fut la seule réponse à une demande orale de subventions de dirigeants d’un club parisien des années 1990.
Ils étaient deux. L’arrondissement concerné est l’un des plus grands de la capitale. « Combien d’enfants dans votre club? » La question est toujours d’actualité dans la plupart des villes moyennes ou grandes. Les subventions publiques sont accordées en fonction du nombre d’enfants inscrits au club ou suivant des cours dans les écoles et des tournois s’y rapportant. La photo d’un adjoint aux sports ou du maire est obligatoire en cas de remise des prix. Le haut niveau? les maîtres? le prêt régulier de salles pour les opens? D’un point de vue électoral, cela ne rapporte rien à court terme.
Et pourtant, la France fait partie des pays d’Europe organisant le plus de tournois. Et pourtant, la fédération fait des profits avec le championnat de France des jeunes rassemblant chaque année entre 1000 et 1200 participants. Et pourtant, la fédération, grâce à sa politique à l’adresse des jeunes entamée par Jean-Claude Loubatière dès 1976, a pu faire naître des talents et les voir se transformer en maîtres et grands maîtres.
Alors, combien de divisions? Effectivement, en France, le jeu d’échecs vit principalement sous la perfusion des deniers publics. Cette ‘exception culturelle’ française voire gauloise basée sur un socle de bénévoles aux attitudes professionnelles a des avantages par rapport au système régional espagnol, au système fédéral allemand ou local-libéral britannique.
Ses inconvénients? On fabrique de la licence jeunes comme on fabrique de la monnaie avec la planche à billets. Les cours dans les écoles? Jolie idée, mais de nombreux intervenants n’ayant pas suivi une formation anti-chahut voient leur cours se transformer en garderie.
Conclusion: on ne sait pas trop combien de vrais joueurs licenciés de tous âges pratiquent le jeu en club ou en compétition. Alors, combien de divisions?
Une licence B a 3 euros pour les jeunes est une bonne chose mais cela permet à des dirigeants de clubs de licencier des jeunes à l’excès. Des collègues m’ont dit recopier les listings des années précédentes. On licencie les jeunes participants aux championnats scolaires, un peu comme si on prenait une licence d’athlétisme à tous les gamins participants aux cross départementaux.
Comme dans certaines régions, on récupère une subvention, en fonction du nombre de jeunes, le calcul est vite fait. Ne vous fier pas à ces clubs avec plusieurs centaines d’adhérents, si vous allez visiter les cours le mercredi au club, vous allez trouver une vingtaine de gosses.
Les entraîneurs et les animateurs sont souvent des travailleurs pauvres, dépendant de contrats précaires auprès des clubs, ou ayant le statut d’auto-entrepreneur, qui doivent pour vivre correctement, trouver des heures et des heures de cours, jusqu’à l’abrutissement.
On veut appliquer des règlements de fédération sportive, mais on est loin d’en avoir les statuts et les revenus.
Les maîtres et grand maîtres ont souvent été des jeunes en rupture scolaire ou ils sont d’origine étrangère. Ils sont dépendants des clubs. S’ils donnent des cours, ils risquent de perdre de niveau. Ils doivent rester au top pour vivre.
Les dirigeants et les arbitres sont souvent des personnes d’un très faible niveau aux échecs, ils sont plutôt de classe moyenne et n’ont souvent pas de respect pour les maîtres, les entraîneurs et animateurs comme on le voit dans l’affaire Feller. Leur engagement est souvent mu par des idéologies suspectes.
Le client idéal pour la FFE, c’est le gars d’un bon niveau social avec deux gosses à 1300 et 1500 élo, qui va réserver sa location à Aix les bains 2 mois à l’avance. On lui vendra de la vanité. Il est facile à trouver,on en trouve dans tous les clubs.
Quant aux championnats par équipe jeune, si cher à Battesti. Les dirigeants de clubs ayant de nombreuses équipes à gérer, ne font plus que de la logistique. On remplit des bagnoles de gamins, on leur fait faire 200 bornes pour jouer l’équipe adverse. On apprend pas à jouer en voiture, çà coûte un pognon monstre, je ne parle pas de l’impact écologique.