Top 12: le scandale des nulles sans jouer malgré un beau championnat

Le championnat de France par équipes comporte cette année 12 équipes au lieu de 16. Il se déroule pour la première fois sur 11 jours consécutifs et en un même lieu. Le club Mulhouse-Philidor s’est « sacrifié pour l’initiative » pour satisfaire le cahier des charges maousse afin d’accueillir une centaine de joueurs: Mulhouse, également connu pour ses organisations impeccables en Nationale I ou II, fait jouer tout ce beau monde à la Cité de l’Automobile.

Cette année comme les autres, beaucoup de nulles sans jouer dans les matches par équipes! Beaucoup trop. Alors que ce championnat tend à se « professionnaliser » et favorise de fait les grosses équipes (les joueurs amateurs devant bloquer 11 jours de suite), les clubs font néanmoins des économies en restant sur un même lieu et sont a priori concentrés. Les nulles sans jouer entre pros font tâche et on nous sort cette fois des « stratégies d’équipes » comme excuse. Conseil: Téléphoner à Bobby Fischer dans l’au-delà ou à Kortchnoï en Suisse pour qu’ils éclatent de rire!

Le championnat se termine le 5 juin. Quatre grosses écuries étaient sur la ligne de départ: Clichy (Jakovenko, Nisipeanu, Fressinet), Évry (Adams, Le, Vachier-Lagrave), Marseille-Échecs (Bacrot, Naiditsch, Istratescu) et l’hôte de la compétition, Mulhouse-Philidor (Dreïev, Navara, A. Sokolov). A suivre jusqu’à dimanche: les retransmissions en direct passionnantes sur le site fédéral ou sur le site de Mulhouse-Philidor et voir le classement ici

1000 euros pour 10 minutes de jeu
Le loto gagnant des nulles sans jouer
Le site fédéral adore Clichy?
Marre de l’échiquier féminin!

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1000 euros pour 10 minutes de jeu
Si quelques grosses pointures sont présentes dans ces quatre équipes et dans d’autres, la gangrène des nulles sans jouer continue. Et dans certains matches, cela a coûté cher: non seulement en terme de résultat sportif, de suspense, mais aussi au club. Payer un très fort joueur 1000 euros pour une partie et le voir disparaître au bout de dix minutes, voyons… quel est le tarif horaire? 600 euros de l’heure? Pas mal, c’est 8 fois le prix d’un consultant moyen hors taxes et 66 fois le tarif horaire du SMIC pour une fatigue toute relative.

Les nulles coûtent cher…
Les nulles sans jouer ne sont pas le fait que des joueurs. On peut ainsi lire sur le site de Mulhouse, dans la rencontre Mulhouse-Marseille (0-3), 3e échiquier Sokolov (Mulhouse)-Naiditsch «Une nulle en 10 coups à peine, les deux joueurs ont décidé de s’accorder un jour de repos. Un choix tactique logique pour les deux équipes.» Ah bon?

En adoptant une stratégie similaire, Évry a sûrement mangé son chapeau et une occasion de battre Clichy lors de la 7e ronde: 3 nulles sans jouer à l’échiquier 2, 3, 4. Caruana (Évry), dernier à jouer, a dû jouer à mort une finale de dames contre Jakovenko (Clichy): bémol, la partie n’est pas dispo et n’a pas été rentrée à la main, le direct a planté sur cette partie à suspense dont dépendait le score final. Dommage, les retransmissions sont à mettre au crédit de cette version du top 12.

Nulles sans jouer: les reçus avec mention très bien
Bacrot
(Marseille-Échecs): Meier-Bacrot (20 coups), Housieaux-Bacrot (21), Riazantsev-Bacrot (14), Bacrot-Leroux (16)
Vachier-Lagrave alias MVL (Évry): Hamdouchi-MVL (12 coups), Bauer-MVL (15)
Relange (Évry): Bodenez-Relange (10), Relange-Aguettaz (16), Relange-Paci (17)

Le loto gagnant des nulles sans jouer:
Alberto David-Dreïev (9!!), Rozentalis-Dreïev (10), Rozentalis-Elianov (11), Pelletier-Adams (12), Vaïsser-Kransenkow (12).

Numéros complémentaires: Bauer-Hamdouchi (13) et Dumitrache-Vaïsser (14). Y ajouter une dizaine d’autres parties de touristes en moins de 20 coups.

Le site fédéral adore Clichy?
Pour revivre les rondes et surtout voir dans quel ordre les points sont tombés, rien de mieux que de suivre un compte rendu subjectif, forcément subjectif, mais haletant d’un site de club comme sur le blog de Clichy qui nous raconte son match décisif contre Évry. Mais voir, jour après jour, les comptes-rendus fédéraux gentiment et subtilement écrits du point de vue de Clichy, c’est entre drôle, prévisible et navrant au choix. Cela me prend le melon…

Marre de l’échiquier féminin
Le Top 12, et toutes les équipes jusqu’en Nationale III, doivent avoir un « échiquier féminin ». Rien que ce terme est discriminatoire et débile. L’idée de départ était d’encourager les clubs à faire jouer les femmes, en minorité parmi les licenciés actifs en compétition.

Ce débat devrait être révisé: les femmes ou jeunes filles sont des hommes – human beings en anglais – comme les autres. Les championnats de France jeunes comportent autant de filles que de garçons.
En travaillant ou en consacrant beaucoup de temps aux échecs, on peut parvenir un fort niveau ou du moins à son niveau d’incompétence comme tout un chacun. La preuve? Les meilleures équipes se paient les services des meilleures joueuses de France… qui ne jouent pas toujours au 8e et dernier échiquier.

L’effet pervers de cette règle? Une équipe qui embauche une très forte joueuse part avec un avantage; du coup, les joueuses négocient logiquement leur cachet à la hausse. Quel est le rapport final avec le fait d’encourager les joueuses? Aucun, zéro, nada. Finalement, seul le Elo fait la loi. Y compris sur l’échiquier… entre deux joueuses.

Les clubs des divisions inférieures? Certains rament quand il ne sont pas carrément contre. Il est souvent difficile de trouver deux femmes disponibles (car souvent il faut une remplaçante ou prévoir l’impondérable) pour 11 rencontres dominicales étalées d’octobre à avril-mai.