Mark Crowther : le TWIC fait pouic

mark_crowther_2_300.jpgFin de partie ou presque pour un ancêtre de l′Internet. L’Anglais Mark Crowther, bibliothécaire de formation, cesse la parution de TWIC (The Week In Chess), son magazine hebdomadaire électronique.

Édité depuis 1994, TWIC était fait de parties au format PGN et de tableaux et résultats de tournois.
Le 29 août, en pleine Olympiade, Mark a annoncé via un communiqué que la collaboration avec le ‘London Chess Centre’ (librairie spécailisée et site de vente en ligne tenu par le MI Malcom Pein) qui l’hébergeait et le sponsorisait depuis 1998 était terminée. L’aventure continuera peut-être sur son site personnel theweekinchess.com. Quelques jours tard, de sa page Facebook, il annonçait qu’il continuerait TWIC après septembre car il devait honorer 3 ou 4 TWIC pour ChessBase.

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TWIC gratuit, TWIC parti ?
Depuis les balbutiements de l’Internet grand public en 1995-1996, tout s’est accéléré dans les échecs et le Net est devenu un vecteur totalement adapté pour les 64 cases ! Beaucoup de tournois, beaucoup d’envois de parties. Avec le temps, le bénédictin Mark Crowther s’est pris au jeu de suivre de plus en plus l’actualité « avec plaisir, mais la charge additionnelle de travail est devenue insoutenable à long terme. J’ai réussi à garder les parties du magazine TWIC gratuites tout au long de ces années, mais dans ce climat économique, je dois voir comment gagner ma vie du mieux que je peux. Peut-être y a-t-il eu la perception que TWIC était un site plus gros et mieux financé qu’il ne l’était en réalité ».

Effectivement, grâce à lui, tous les joueurs de compétition et bien sûr tous les pros de la planète ont pu stocker dans leurs ordinateurs des parties ‘propres’, c’est-à-dire bien indexées, avec des noms unifiés, des présentations impeccables. Môssieur Kasparov et la crème du top 100 mondial également.

Un pour tous, tous pour lui !
Finalement, TWIC c’était un peu comme Wikipédia : 98 % de consommateurs pour 2 % de contributeurs sauf que Mark Crowther, c’est 1 qui fait tout le boulot face à la communauté du jeu d’échecs tout entière.

Accord payant ?
Dans le communiqué et plus spécifiquement sur sa page Facebook, on sent très clairement que Crowther veut encore servir la communauté du jeu. La phrase sur les sites commerciaux qui utiliseraient son travail est bizarre. Des années pour s’en rendre compte alors quune fonction dans ChessBase permet de télécharger TWIC en un clic ? Peut-être Mark a-t-il été le fusible d’un désaccord entre ChessBase, qui utilise les bases de données pour vendre ses logiciels, et le London Chess Centre qui avait son joker bénédictin à demeure depuis 1998 ?

Parties impayables ?
L’un des problèmes de base dans cette affaire est qu’il n’y a aucun droit d’auteur sur les parties entre deux joueurs. Du temps de Lasker, et même avant, ce sujet est régulièrement revenu sur le tapis. Toute tentative de développer un droit d’auteur dans les parties de maîtres est restée vaine. Tant mieux puisque les échecs, c’est une discipline basée sur l’accumulation des connaissances et la remise en question des évaluations du passé.

Quel modèle économique pour TWIC ?
Crowther pense que « quelques milliers » d’abonnés suffiraient à maintenir sa peine estimée dans le blog excellent de Steve Giddins à 24 h par semaine, soit au moins trois jours de travail. Mais si Crowther confesse qu’il sait faire plein de choses dans le web, lançant indirectement une auto-annonce, il avoue également qu’il ne peut tout faire tout seul.
De ce point de vue, il est intéressant de lire son mot de félicitations envoyé en août 2003 à la petite équipe de russophones qui publie un magazine hebdomadaire en anglais Chess Today. Chess Today est payant, très orienté sur la technique de haut niveau… et toujours vivant. TWIC est gratuit, brillant, encyclopédique, indispensable, mais repose sur les épaules d’un seul homme. L’union fera-t-elle la prochaine force de Mark ?

Les archives de TWIC (à partir de juillet 2002)

 Voir un article précis et circonstancié de l’inénarrable Steve Giddins sur son blog.

 P.S. Elista 1996 : Avec un tout petit ordinateur portable et une liaison du fournisseur d’accès américain Compuserve qui avait un serveur-relais à Moscou, je fus « le petit télégraphiste » du championnat du monde Karpov-Kamsky.
Du fin fond de la Kalmoulkie, j’envoyai gratuitement, pour le compte de la FIDE par salves de 2-4 coups, les coups de chaque partie par courriel à Mark Crowther et au serveur américain ICC (Internet Chess Club) qui existe encore. TWIC et ICC étaient plus rapides que les agences de presse, y compris les agences russes qui n’avaient de correspondant permanent pendant le mois et demi que dura le match.

Les Américains d’ICC (qui travaillaient et travaillent TOUJOURS sous DOS) furent parfois très pressants par e-mail et une paire de fois par téléphone! Mark fut toujours d’un flegme absolu et rendit compte aussi des nouvelles transmises comme quand Rustam Kamsky, le père du champion, voulut passer faire défiler des jeunes filles pour choisir une future mariée à emmener aux États-Unis ou quand il menaça verbalement de mort un technicien de la salle de presse, sous les yeux ébahis du commentateur, le GMI Vassioukov.

A ne pas manquer : Comment Karpov explique quelques parties de son match contre Kamsky en vidéo avec le GMI Ron Henley, l’un de ses trois secondants avec Epichine et Zaïtsev dans le dernier match du championnat du monde qui connut les ajournements.