Mémorial Alekhine : Énormes victoires des Français contre Kramnik et Svidler
Les spectateurs s’en souviendront. Les internautres n’en croyaient pas leurs yeux. Et tous les autres ne se lasseront pas de rejouer les parties. Vachier-Lagrave a battu Svidler sur une Grünfeld… que Svidler a cherché à éviter.
Il a perdu le fil alors qu’il restait une paire de tours, un cavalier blanc et un fou noir. Le Saint-Pétersbourgeois préfère les parties complexes. Maxime a passé un cap dans ce volet parisien. Il a pris son temps pour exécuter techniquement l’ouvrage et prendre provisoirement la tête avec +2 (2 victoires 3 nulles).
Le plus énorme a été Laurent Fressinet. Avec les noirs, il joue une défense risquée, la Tchigorine (1.Cf3 d5 2.g3 Cc6 3.d4 Fg4) sur les conseils de son secondant hongrois Richard Rapport.
Un bon rapport qualité/prix celui-là. Vice-champion du monde junior 2012 derrière Ipatov et devant Ding, ce jeune de 17 ans a le même culot que Fressinet au même âge en beaucoup plus fort. Une sorte de ‘all in’ au bluff contre Kramnik ? Un hommage rendu à Alekhine pour une partie pleine de feux d’artifice ?
Kramnik n’a pu jouer la visse sur le début Réti. Fressinet gambite un pion, fait le grand roque. Psychologiquement, c’est gagné car Kramnik n’est plus chez lui. En d’autres temps, il aurait relevé le défi et trouvé le chemin le plus stressant pour les noirs. Mais Kramnik paraît absent dans ce tournoi. En fait, il est chez, lui… à Paris, devant répondre à moult sollicitations.
Revenons à la partie. Les noirs ont trop de jeu pour la pièce sacrifiée d’un point de vue pratique. Partie d’école : roi au centre, pièces non développées, colonnes h et g ouvertes pour les noirs. Tout y est et Fressinet est en mode automatique.
Kramnik abandonne au 32e coup. Il s’est fait massacrer avec les blancs. Si l’on avait masqué le nom des joueurs, on aurait parié ni sur l’un ni sur l’autre. Fressinet ne gambite jamais. Kramnik n’a pas perdu avec les blancs une partie lente en moins de 32 coups depuis sa jeunesse !
Oui, ce fut une journée mémorable et ensoleillée. Fressinet, toujours bonhomme, répond aux sollicitations des nombreux joueurs de clubs chassant l’autographe à la sortie. La presse russe n’en a fait qu’une bouchée. Il enchaîne dehors, toujours dans sa partie.
Fressinet aussi vient de passer une barrière. Kramnik n’est plus là-haut sur la montagne du Elo et invincible avec les blancs. Avec son nouveau préparateur de potion magique, le Français pourra encore sûrement surprendre. A Saint-Pétersbourg, la lutte pour savoir qui est le patron sur l’échiquier sera rude.
Pour le plus fort tournoi joué à Paris dans les temps modernes, ces cinq rondes furent une réussite. De belles batailles, pratiquement pas de nulles de camouflage. Anand en embuscade, prêt à bondir en mode tigre. Aronian revient quand on le croit perdu. Des Français prêts à bien faire devant leur public. Une organisation à 2900 Elo respectueuse du joueur amateur et de club. Coucou et merci aux sponsors russes Filatov et Timtchenko. Suite et fin du tournoi avec les quatre dernières rondes à partir de dimanche à Saint-Pétersbourg.
Ronde 5
Svidler-Vachier-Lagrave 0-1
Anand-Ding 1-0
Kramnik-Fressinet 0-1
Guelfand-Aronian nulle
Adams-Vitiougov nulle
Parties commentées en anglais sur le site de ChessBase
Vachier-Lagrave est seul en tête avec ‘+2’ (2 victoires, 3 nulles soit 3,5 sur 5) suivi de quatre joueurs à ‘+1’ (3 pts sur 5): Aronian, Adams, Fressinet, Guelfand.
© Photos site Éric Cheymol
Vous avez loupé le direct « off » du tournoi ? Lisez les gazouillis en moins de 140 mots avec quelques photos sur le compte twitter d’Echecs 64 (pas besoin d’ouvrir de compte).
Dimanche, parties en direct à 12 h, heure de Paris
Sur le site officiel et commentées en trois langues : anglais, français, russe.
Sur whychess.com ou sur chessbomb avec des analyses de l’ordinateur Houdini.
Étienne BACROT nous demande de signaler qu’il n’a JAMAIS écrit un quelconque commentaire sur ce blog contrairement à ce que le nom de l’auteur de 2 commentaires pouvait laisser croire.
Les commentaires en question ont été laissés, mais le nom des auteurs a été changé par Echecs 64 en ‘Olympiades’ et ‘Classement Elo’ ci-dessus.
Tete de nœud ! J’ai écrit un post à un instant T en me basant sur le site 2700 live queue tlm connaît ici….sauf toi
Etienne BACROT jouera-t-il au premier échiquier de l’équipe de France lors des prochains grands rendez-vous mondiaux par équipe ?
Il le mérite en tout cas.
Imaginons l’équipe : Etienne Bacrot au 1er échiquier / MVL au second / Fressinet au troisième / Romain EDOUARD au 4eme.
Par ailleurs, quand Sébastien FELLER (7eme au championnat d’Europe 2011) rejouera, ça fera très très mal !
Le dernier classement ne prend pas en compte le mémorial Alekhine, où MVL gagne 3 points, malgré ses deux défaites finales.
Etienne Bacrot a glané contre une faible opposition beaucoup de 0,80 point au Neckar Open et à l’open d’Ajaccio, mais l’essentiel de sa progression vient de la Bundesliga (15 parties contre seulement 5 pour MVL).
Néanmoins, l’unique défaite d’Etienne en Allemagne est l’oeuvre de… Maxime, à qui l’avenir appartient !
Contrairement à ce qu’on peut lire dans un des commentaires qui précèdent, MVL n’a rien repris du tout sur Bacrot…
Bien au contraire, puisque Bacrot est désormais numéro 1 français au classement FIDE de mai.
En ce qui concerne Fressinet, il va devoir battre plusieurs GMI du niveau de Kramnik pour remonter la pente.
23e mondial = Bacrot, Etienne g FRA 2725
27e mondial = Vachier-Lagrave, Maxime g FRA 2718
56e mondial = Fressinet, Laurent g FRA 2693
Bravo MrBootons pour cette semaine de commentaires sur la leg parisienne de ce tournoi passionnant. Du bon boulot.
Amitiés échiquéennes,
Lambert
PS Qui est le secondant de MVL?
Ouf ! MVL à repris sa place devant EB ! Ne reste plus que LF pour bien finir le tournoi et dépasser EB !
Ses deux parties de LF et MVL sont les deux belles parties jouées par des Français depuis Philidor !
Lors de la 5eme ronde, la victoire de MVL contre Svidler est bien plus impressionnante que celle de Fressinet.
Celle de Fressinet est très sympa mais il ne jouait pas contre le vrai Kramnik ce jour-là, mais plutôt contre un joueur totalement absent de sa partie comme cela peut arriver à n’importe quel joueur d’échecs : Kramnik regardait sans cesse les spectateurs, et n’arrêtait pas de faire des allers-retours vers le sas de décompression (petite salle où se rendaient les joueurs sans doute pour boire ou pour d’autres besoins…).
Même la paire Mullon-Pelletier a remarqué cette absence dans ses commentaires audio ! C’est Pelletier qui a fait cette remarque intéressante.
Kramnik semblait être heureux d’être là. On avait l’impression qu’il venait d’apprendre une bonne nouvelle et qu’il y pensait… Il a sans doute sous-estimé Fressinet en pensant qu’il ne pouvait pas perdre contre lui.
Puis, au bout de 10 coups, il s’est mis à comprendre qu’il était mal… trop tard, car face à lui, Fressinet a déroulé en mode rouleau compresseur.
Entre Kramnik-Fressinet et MVL-Ding (2e rde), les Français ont déjà “commis” 2 parties “grand-style” dignes de figurer dans les livres. Si en plus, ils peuvent terminer le tournoi sans baisse de régime, sûr que les Russes vont les regarder différemment à l’avenir…